Kindia : à la découverte de la communauté FASO KELE (les enfants d’un seul père) du village rasta de Kouroukan Fouga

Se trouvant à une trentaine de kilomètres de la commune urbaine de Kindia, le village rasta ou Kouroukanfouga est situé dans le district de Condoya, dans la sous-préfecture de Samaya. Il est occupé par une communauté rasta appelée « FASO KELE » qui signifie littéralement les enfants d’une seule nation ou d’un seul père. Avec une identité particulière, ces hommes de longs cheveux naturels se mettent à l’abri de tout ce qui est contraire à l’humanité.
Comment vivent-ils ? Quelles sont leurs principales activités ? Collaborent-ils avec les autres communautés de la contrée? Et, quel est leur but principal ? Toute la réponse dans l’immersion de notre correspondant dans ce village singulier de Guinée
Installés sur un environnement de 6 hectares au pied d’une montagne, ces rastas disent être conduits par Jah (dieu des rastas) pour occuper ce village d’une image verdoyante. Vivre sainement, être auprès de leurs ancêtres sont en quelque sorte les raisons principales de cette migration ou l’installation de FASO KELE dans les entrailles de Samoukiri Samaya, dans la préfecture de Kindia. Kibaro Konaté alias « Gbassi Kolo », fondateur de ce village créé le 13 avril 2016 revient sur le début de cette occupation fascinante.
« Nous sommes là cela fait à peu près huit ans depuis le 13 avril 2016 et l’objectif c’est de vivre sainement et être auprès de nos ancêtres et s’éloigner de tout ce qui est contraire à l’humanité. Donc nous sommes là pour un monde meilleur. Je crois c’est JAH qui nous a conduits vers là, et ce n’est pas vraiment notre choix et ce n’est pas nous qui avions cherché ici mais quand ils étaient prêts à vendre bien que nous étions loin d’ici, on a reçu les messages à l’immédiat on a dit voilà ça rentre dans le cadre. Donc je crois c’est JAH qui nous a guidés-là parce qu’avant tout d’abord Sa Majesté impériale HAÏLE SELASSIE était là pour la pose de la première pierre du barrage qui est là à Donkeya. Et je crois un peu partout en Afrique là où les rastas sont naturellement Sa Majesté est passée là-bas. La Côte d´Ivoire c’est comme ça, le Mali, plus souvent et ça vient naturellement », a d’abord expliqué ce président du mouvement rasta en Guinée.
Dans ce village rasta appelé KOUROUKANFOUGA (lieu où Soundiata Keïta aurait été couronné roi des rois), c’est le vivre ensemble qui prédomine, tout ce qui s’y trouve est commun, une vie de la responsabilité collective d’une communauté purement panafricaniste. Des lieux comme le jardin de KIBANGO (Papa Kibango, un prophète noir qui se serait battu pour la cause des noirs), la partie FIDEL CASTRO ou encore la source d’eau de FAROKANBALY (dieu ancestral des rastas) ont aussi été visités.
« On est là flexible, il n’y a pas de vol, nos portes sont grandement ouvertes, on vit socialement. Avant le village on était ensemble, ce n’est pas le village qui nous a réunis. On a vécu ensemble, on s’est connu au Mali, moi j’étais en aventure ainsi que les autres. On s’est connu et on a décidé de créer un groupe appelé NAYABINGUI, faire des albums et faire des concerts un peu partout dans le monde. On a créé le groupe et on a fait des concerts partout. Par après nous avons compris que ce n’est pas la musique seulement qui va nous permettre d’atteindre l’objectif. Automatiquement, il fallait orienter le combat vers le social. Donc, on a commencé à réfléchir sur les maux qui minent nos sociétés comme la migration que nous avons beaucoup combattue mais surtout l’accaparement des terres africaines par les multinationales qui font de grandes agricultures chimiques. Donc on a mené ce combat un peu partout en Afrique avec tout ce que nous avons comme notion de vie. Alors pourquoi ne pas créer un environnement sain pour nous? Et, contribuer à restaurer la nature, faire ce que nous pouvons et qui n’a rien à voir avec la publicité », dit-il.
Dans une spiritualité profonde, cette communauté rasta se démarque de par sa particularité culturelle. Aux environs des maisons, des maniocs sont plantés et dans leurs bas-fonds on trouve des maïs, des choux en provenance d’Allemagne, des aubergines et autres tubercules, cultivés juste pour la consommation. Mais c’est quoi le rasta ? Et comment peut-on le devenir ? Sur la question, Gbassi Kolo précise:  « Être rasta, ça demande des caractères divins et cette divinité on ne peut pas l’apprendre même si on l’apprend on ne peut pas l’appliquer parce qu’une mauvaise personne ne peut pas être  bonne toujours, si elle peut l’être c’est juste pour trois jours. Également pour une bonne personne, si elle est mauvaise, c’est juste pour trois jours car ce n’est pas en elle. Donc c’est ça le rastafariste, on ne le devient pas, on naît rasta parce que c’est la positivité. C’est d’être propre et sain. Ce n’est pas aller lire la Bible ou quoi? Ce n’est pas ça, c’est en toi, il vit en toi. Donc c’est des choses qu’on ne peut devenir mais tu peux devenir ministre quand même mais le rasta, on naît avec. »
Concernant la religion dans ce village de Kouroukanfouga, ces éléments du groupe « Nayabingui » tiennent beaucoup à leur identité culturelle malgré la diversité religieuse dans le pays. Leur communauté est composée de musulmans et ceux qui vénèrent l’empereur Sa Majesté HAÏLE SELASSIE.
« Nous, nous avons compris dans nos savoir-faires que le salut est personnel et ce qui concerne notre identité, on ne va pas tolérer qu’une autre religion ou une diplomatie tente de l’anéantir. C’est notre identité et on va défendre. Mais à part ça, je crois ce qui concerne la spiritualité ou la religion, je crois le salut est personnel comme chez nous ici au village rasta. On a nos femmes qui partent à la mosquée. Dans le mois du ramadan, on investit, elles font leur jeûne. Nous aussi nos amis rastas qui sont musulmans qui prient, qui font tout. Ici, nous vivons paisiblement mais quand il s’agit de notre combat identitaire, nous n’allons pas parler là-bas de l’Islam ni du Christianisme ou autre chose. On défend notre identité. A part ça la religion, c’est ton problème, cherche ton salut, ça t’appartient. Ici c’est le monde meilleur qui est ouvert à tout le monde mais ce qui est le plus important à comprendre sous le drapeau de JAH, beaucoup seront appelés mais peu seront élus » explique Gbassi Kolo.
La communauté FASO KELE de Kouroukanfouga (au village rasta) ne vit pas de façon autarcique malgré moult règles établies pour la sauvegarde de leur identité culturelle mais surtout leur environnement comme l’interdiction par exemple de la coupe des bois, la chasse entre autres. Elle est en relation avec les villages environnants, a ajouté Kibaro Konaté alias « Gbassi Kolo en ces termes: « On vit ensemble surtout quand il y a les problèmes sociaux, on donne nos parts contributives. Je crois l’hôpital d’ici depuis 1995 malgré tous les hommes riches qui sont passés ici , c’est nous les rastas qui ont renouvelé et envoyé les médicaments même en Europe pour les communautés. On a contribué également à la construction de leur marché. A part ça chaque problème, des décès, des naissances, les mariages, des familles viennent nous voir, on donne les contributions. Donc nous vivons dans une harmonie totale. Nous sommes leurs fils, il n’y a pas de distinction entre nous. Seulement, nous essayons de leur montrer qu’ils ont tout autour d’eux et ils nous comprennent aussi. Il n’y a aucun problème. On a épousé leurs filles, nous sommes devenus des parents. Donc nous vivons dans une harmonie parfaite ».
Au-delà de cette organisation fascinante et très accrochés à leur identité culturelle, les rastas de Kouroukan fouga dont le nombre d’occupants est estimé à une trentaine de personnes (les résidents) s’investissent aussi dans la fabrication de plusieurs objets comme les chaussures, les sacs, les collier, etc. Ils disposent également d’un studio d’enregistrement de musique gratuit pour les artistes qui y viennent.
Aboubacar Dramé, de retour du village Rasta
+224 623 08 09 10

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